Un astéroïde est tombé sur Terre et des morceaux ont été récupérés

Le lien entre astéroide et météorites : la récupération de fragments de l’astéroide 2008 TC3, tombé sur Terre le 6  octobre 2008

Le 7 Octobre 2008, l’astéroïde 2008 TC3 est tombé sur Terre et certains fragments ont été récupérés. Que peut-on tirer de ces collectes scientifiques?

Qu’est-ce qu’un astéroide?

Un astéroide est un corps rocheux du système solaire dont la taille est variable. Cela va de quelques dizaines de mètres à plus d’un millier de kilomètres. La définition d’un astéroide est toutefois moins claire depuis la nouvelle définition de planète. Ainsi, Céres est une planète naine mais est aussi un astéroide. Ces astéroïdes peuvent être différenciés, c’est à dire possèder un manteau et un noyau.

Où sont situés les astéroides?

Les astéroïdes sont situés dans différentes zones du système solaire :

  • La ceinture d’astéroïdes est le lieu le plus connu. Il s’agit d’une zone comprise entre l’orbite de Mars et l’orbite de Jupiter, entre 2 unités astronomiques et 4 unités astronomiques (1 UA = Distance Terre-Soleil = 150 millions de kilomètres). On y a dénombré pour l’instant plus de 20 000 objets. On pense que ce sont les résidus d’une planète non agrégée, sa formation ayant été empêchée par les forces gravitationnelles dues à Jupiter.

  • Les astéroïdes troyens sont un peu plus de 2000. Ils se situent sur l’orbite de Jupiter, à des positions rendues gravitationnellement stable par la compensation entre l’attraction de Jupiter et l’attraction du Soleil.

  • Les astéroïdes géocroiseurs dont l’orbite croise celle de la Terre. Ils sont souvent (mais pas toujours) leur aphélie dans la ceinture principale entre mars et Jupiter, mais leur périhelie plus pres du soleil qu’1 UA. Ils sont ceux qui ont donc la probabilité la plus grande de tomber sur notre planète

  • La ceinture de Kuiper située entre 30 UA et 100 UA, au delà de l’orbite de Neptune, est un réservoir certainement très important d’astéroïdes. Les objets qui la composent sont dits objets transneptuniens. Parmi les objets les plus célèbres, on compte Pluton, Charon ou encore Sedna et Eris.

  • Les Centaures sont des astéroïdes situés entre les planètes géantes dont la composition ressemble plus aux comètes qu’aux astéroïdes.

Figure:
Localisation des différents réservoirs d’astéroïdes au sein du
système solaire. Figure : Tristan
FERROIR

Les différents types d’astéroïdes

Les astéroïdes sont classés en fonction du spectre de leur surface et de leur albédo. On distingue alors les types suivants, par ordre d’importance

  • le Type C : ce sont des astéroïdes sombres (albédo ~ 0.03) de type carboné qui ont des spectres proches des chondrites carbonées. Leur composition chimique semble proche du Soleil aux volatils près. Ils représentent 75% des
    astéroïdes observés. Ce type présentent des sous-types : les types B, F et G

  • le Type S : ce sont des astéroïdes clairs (albédo 0.10 à 0.22) de type silicique composés de silicates ferromagnésiens (olivines, pyroxènes) mélangés à du fer, du nickel et du magnésium metallique. Ils représentent 17%
    des astéroïdes observés.

  • le Type M : ce sont des astéroïdes moyennement clairs (albédo 0.10 à 0.18) de type métallique essentiellement composés de fer et de nickel avec très peu de silicates. Ils représentent environ 8% des astéroïdes observés

  • Les Types plus rares (non exhaustif)
    • le Type A : supputé être uniquement du manteau, ils présentent une couleur rouge intense

    • le Type E : type dont la composition chimique serait proche des chondrites de type chondrites à Enstatite

    • le Type Q : type dont le spectre est proche de celui des chondrites ordinaires

    • le Type V : type dont le représentant le plus connu est Vesta

Figure:
À gauche Gaspra, un astéroïde de type S, ( diamètre ~ 15 km) au milieu Mathilde (diamètre ~ 50 km), un astéroïde de type C et à droite Vesta, un astéroïde de type V (diamètre ~ 520 km). Gaspra et Mathilde ont été survolé de près par des sondes et satellites. La photo de l’astéroïde Vesta est de moins bonne qualité car il n’a pas été survolé : la photo est prise depuis le telescope spatial Hubble.. Copyright NASA

Des météorites particulières : les ureilites

Les ureilites sont des météorites relativement rares dont on dénombre environ 250 spécimens à l’heure actuelle à comparer aux 36 000 chondrites repertoriées. Les ureilites au contraire des chondrites sont des météorites dites différenciées présentes sous deux types de pétrologie :

  • les ureilites monomictes qui sont des roches constituées de larges olivines (~1mm) , de pyroxènes (le plus souvent de la pigeonite) et de phases carbonées (graphite et diamant) qui représentent environ 2 à 4% de la masse. Ces
    ureilites sont les plus abondantes.

  • les ureilites polymictes plus rares qui sont souvent des brèches constituées des mêmes minéraux que les ureilites monomictes auxquels s’ajoutent des feldspaths (environ 2%) et des phases accessoires (alliage fer-nickel, spinel…)

Dans les ureilites monomictes, les différents minéraux s’agencent de façon granoblastique avec des jonctions triples entre les différents grains. Cet argument structural tend à montrer que ces roches sont des cumulats magmatiques ou des résidus de fusion. L’absence de composant feldspathique au sein de ces roches confirme cette proposition.

Certaines ureilites très peu choquées ne contiennent que du graphite alors que la plupart des ureilites contiennent aussi bien du graphite et du diamant. La matière carbonée n’est pas répartie aléatoirement au sein des ureilites. Elle se trouve de façon interstitielle entre les minéraux principaux. La présence de ce carbone a pour conséquence la mise en place de zone de réaction de taille comprise en 10 µm jusqu’à 500 µm au contact entre les olivines et le carbone. Ces zones de réaction présentent une réduction dont la minéralogie caractéristique est essentiellement constituée de forstérite pure, d’enstatite et de fer. L’origine de ce carbone est très débattu : s’agit-il de carbone injecté lors d’un impact comme en témoigne la présence de diamant qui est un minéral caractéristique d’un métamorphisme de haute pression et la réaction entre les olivines et le carbone ou bien de carbone déjà présent sur le corps parent comme le suggère la présence de
graphite dans des ureilites non choquées?

Figure:
Lame mince en lumière polarisée non analysée de l’ureilite NWA
4515. Les zones noires sont les zones carbonées et les zones de
réduction dans les olivines. Photo : Tristan
FERROIR

Un précédent lien entre astéroïde et météorite : l’exemple des HED et de l’astéroïde 4-Vesta

Etablir la provenance des météorites est toujours un challenge pour les scientifiques. Différentes méthodes sont employées, la première étant de reconstituer la trajectoire à partir de mesures et d’observations réalisées par les télescopes ou les radars météorologiques. C’est ainsi que la trajectoire de la météorite de Peekskill a pu être évaluée et déterminée comme provenant de la ceinture d’astéroïdes. La deuxième méthode est de comparer les spectres des astéroïdes à celui des météorites que nous possèdons en laboratoire. Pour cette méthode, l’exemple de la classe des HED (pour Howardite, Eucrites, Diogénites
qui sont des achondrites basaltiques et gabbroïques) est exemplaire. Les scientifiques ont mesuré le spectre de reflectance de ces météorites en laboratoire et l’ont comparé à celui de l’astéroïde 4-Vesta, situé dans la ceinture d’astéroïde et qui fait 530 km de diamètre.
La correspondance entre les bandes d’absorption étant très bonne, on a supposé que ces météorites provenaient de cet astéroïde. De plus, la présence d’un immense cratère de 450 km de diamètre et environ 10 à 20 km de profondeur a supporté l’idée que les météorites HED ont été éjectées lors d’un choc extrêmement violent.

Figure:
Spectre comparé des HEDs (traits pleins) de Vesta (carré). On
constate une bonne correspondance entre les valeurs d’absorbance.
D’après Binzer et al., Science, 1993

Les fragments de l’astéroide 2008 TC3

L’astéroïde 2008 TC3 est un petit astéroide géocroiseur d’environ 2 à 5 mètres de diamètre qui a été découvert le 6 octobre 2008 à 6h39 du matin UTC par un télescope de l’Arizona. Les calculs ont montré qu’il s’écraserait sur la Terre environ 19
heures après cette découverte. Ce fut le cas et cette chute qui se produisit au Soudan a pu être observée par différents témoins présents dans la Station 6 de la ligne ferroviaire située entre Wadi Halfa et Al Khurtum. L’explosion de l’astéroïde, vers 37 km d’altitude, a pu être observé aussi par un satellite météorologique.

Figure:
Augmentation de température liée à l’explosion de l’astéroïde 2008 TC3 dans l’atmosphère vue par un satellite météorologique. L’échelle colorée à droite est graduée en Kelvin et permet de localiser cette augmentation. Image EUMETSAT

Les scientifiques pensaient au départ que le corps était beaucoup trop petit pour que des fragments aient pu survivre à l’entrée puis à l’explosion dans l’atmosphère. Cependant, deux missions (5-8 décembre et 25-30 décembre 2008) ont été mises en place pour rechercher d’éventuels fragments le long de la trajectoire de chute.

Figure:
La flèche blanche représente la direction de 2008 TC3 ainsi que sa projection sur la Terre si l’objet n’avait pas ralenti. Les différentes altitudes sont indiquées dans les ovales blanc en kilomètres. La taille des symboles rouge indique les petits (1-10g), moyen (10-100g) et gros (100-1000g) fragments météoritiques. Les masses indiquées dans les rectangles blancs marquent les positions où la chute de météorites de telles masses sont prédites (plus le fragment est gros, moins il est freiné par l’atmosphère). Les zones en jaune pâle transparent indique les endroits où les fragments ont été recherchés. Aucun fragment de grosse masse n’a pu être observée. La ligne jaune matérialise la ligne de chemin de fer. D’après Jenniskens et al., Nature,
2009

Les équipes ont pu récupérer 47 météorites totalisant une masse de 3.95 kg.

 

Figure:
Photographie de différents fragments des météorites Almahata Sitta
récupérée par les équipes d’exploration.D’après Jenniskens et
al., Nature, 2009

Ces météorites ont été classées comme des uréilites polymictes très particulières. En effet, la densité moyenne des météorites collectées est de 2.10 à 2.50 g/cm-3 alors que les ureilites typiques ont une densité de 3.05 g/cm-3 c’est à dire un
densité comparable à celle d’un gabbro. Cette différence de densité montre donc que les météorites et par conséquent l’astéroïde est extrêmement poreux, de l’ordre de 25 à 37%! Cette forte porosité explique que ce type d’ureilites très poreuses n’ait pas encore été collecté puisque cela rend l’astéroïde très fragmentable et donc consumable facilement dans l’atmosphère. Les ureilites étaient jusqu’à présent considérée comme provenant d’astéroïdes de type S, c’est à dire les astéroïdes
siliciques. Or, les spectres de 2008 TC3 et des météorites collectées sont très proches d’un astéroïde de type F, c’est à dire un type carboné. A l’heure actuelle, seul un seul astéroïde de type F est connu, 1998 KU2, et 2008 TC3 semble avoir une
provenance voisine de ce-dernier.


Commentaire

Un astéroïde est tombé sur Terre et des morceaux ont été récupérés — Un commentaire

  1. Bravo pour ces explications. Je viens de voir un documentaire de 4 minutes sur une simulation de l’impact d’un gros astéroide sur notre bonne vieille terre. On serait ravagés et brulés.

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